21.09.2007 - R 528
Étape:Propositions cantonales

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève considérant :

– la nécessité de garantir en tout temps l’accès aux informations ;

– la nécessité de maîtriser complètement les outils utilisés ;

– la dimension développement durable du modèle économique qui soustend cette résolution ;

– la décision du Conseil d’Etat de promouvoir les logiciels libres (mesure 28, paquet 1 du 30 mars 2006), décide d’équiper les postes de travail informatiques des parlementaires en s’appuyant sur des standards ouverts et des logiciels libres dès la prochaine législature.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames et Messieurs les député-e-s,

A la première page de la Feuille d’Avis Officielle parue le 19 juin 2006, le conseiller d’Etat en charge du Département des constructions et des technologies de l’information déclarait, lors de la cérémonie de clôture des « Linuxdays 2006 » : « … j’aimerais évoquer une valeur fondamentale que nous partageons toutes et tous: la liberté.

Les logiciels libres incarnent précisément cette valeur indissociable d’une économie libérale. Liberté des créateurs et des utilisateurs, qu’il s’agisse d’individus, d’entreprises ou d’administrations publiques. Liberté d’installer, d’utiliser et d’exploiter, sans restriction, des logiciels. Et de contribuer ainsi à une saine évolution des technologies de l’information. Liberté d’accès à l’information pour toutes et pour tous, comme le requiert la démocratie qui nous est chère. Une liberté dont les pouvoirs publics se doivent d’être les garants. Cette liberté en matière de technologie de l’information est indispensable. Non seulement elle participe à la démocratie, mais elle la garantit. Les logiciels libres sont, en quelque sorte, des outils de la démocratie. Nous ne devons pas perdre de vue que ce sont la philosophie et l’idéal de liberté incarnés par les logiciels libres qui sont historiquement à l’origine du développement de nos systèmes d’information. » (http://www.geneve.ch/fao/2006/20060519.asp)

Pour la XIIIe législature, débutant en juin 2007, l’Assemblée nationale française a lancé une annonce de marché public qui avait pour objet la mise en œuvre de l’environnement logiciel libre des postes micro-informatiques des députés (voir l’annonce en annexe).

Le projet a été défendu par les députés Richard Cazenave et Bernard Carayon (UMP) (voir http://www.zdnet.fr/actualites/informatique/ 0,39040745,39363623,00.htm), qui mettent en avant (http://www.richardcazenave.com/?2006/11/23/237-rc-bc-logiciels-libresassemblee-nationale-2007) certains avantages des solutions non propriétaires dont « l’allégement du coût des équipements informatiques publics et le transfert de la valeur ajoutée vers des prestataires français et européens ».

Avant de prendre sa décision, l’Assemblée a commandé une étude à Atos Origin, qui conclut que «les solutions libres offrent désormais des fonctionnalités adaptées aux besoins des députés et permettront de réaliser de substantielles économies en dépit de certains coûts de mise en œuvre et de formation».

L’appel d’offres visant à renouveler l’informatique de l’Assemblée nationale a été remporté par les SSII Linagora (http://linagora.com) et Unilog (http://unilog.com). Ces deux sociétés assureront la mise en œuvre et la maintenance. Le coût serait de l’ordre de 80 euros par poste pour un total d’un peu plus de 1100 postes de travail. (http://www.01net.com/ article/343256.html).

L’informatique fait aujourd’hui partie de notre quotidien. Depuis quelques années, la question de l’accès à l’information revient de manière soutenue dans les discussions. Plus encore que les applications elles-mêmes, les formats propriétaires des données sont remis en cause, car ils ne peuvent être lus par toutes les applications. Cette fermeture ne peut plus garantir la pérennité des données, et plus largement le partage de la connaissance est rendu aléatoire et dépendant (du pouvoir économique de la personne).

La plupart des administrations se tournent vers les standards ouverts (systèmes, implémentations) et les logiciels libres (programmes) et cela non seulement pour des raisons économiques mais pour garantir la pérennité des données. Un rapport de l’Observatoire technologique publié en septembre 2005 présente les diverses approches envisagées par un certain nombre de gouvernements s’étant clairement positionnés en faveur des standards ouverts et des logiciels libres (http://ot.ge.ch/ot/IMG/pdf/soll-clarification-V1.0.pdf).

Dans un document daté de juillet 2006, les mêmes auteurs font un recensement des développements ayant adopté des solutions ouvertes dans notre environnement. « Nous avons recensé plus de 40 solutions, composants et outils open source utilisés dans nos organisations. (…) Globalement, on se rend compte que de nombreux services travaillent déjà quotidiennement et à satisfaction avec du logiciel libre, et ce dans divers domaines. On y retrouve des outils de développement, des outils d’infrastructure, des distributions, des serveurs, des composants de sécurité, des composants réseau, des composants du poste de travail et des solutions applicatives. De nombreuses solutions recensées sont en production dont certaines sont même stratégiques (le portail ou les solutions de e-learning à l’université par exemple) ». (http://ot.ge.ch/ot/IMG/pdf/ot-soll-synthese-V100.pdf). Il y a encore un peu de chemin à parcourir.

Les mouvements de migration (informatique) s’amplifient en Europe et dans le monde, citons à titre d’exemples :

  • – Allemagne : villes de Munich, Manheim, Schwäbisch Hall, Deutsche Bähn – 55 000 postes migrés;
  • – Autriche : la ville de Vienne est en route vers le libre ;
  • – Danemark : vote à l’unanimité du Parlement danois en juin 2006, de l’utilisation obligatoire de standards ouverts dans les technologies de l’information du pays à partir de 2008 au plus tard;
  • – Espagne : Andalousie et Extremadure travaillent en libre ; en 2005, la sécurité sociale espagnole s’équipe en serveurs « libres » ;
  • – Norvège : dès 2005, le gouvernement, parlant du secteur public, déclare « les formats propriétaires n’ont plus leur place dans les échanges entre citoyens et gouvernement »;
  • – Royaume Uni : les villes de Birmingham, Nottingham et Newham sont sur le libre ;
  • – Chine : 85 % des ordinateurs du gouvernement fonctionnent en mode libre.

Le Grand Conseil a comme mission première de voter les lois et le budget. Mais il se doit également d’être exemplaire dans les orientations qu’il préconise, qu’il choisit. Cette résolution est modeste relativement à l’ampleur des domaines touchés par le Grand Conseil. Cependant, sa dimension symbolique est très importante, elle prend en compte une évolution dans le domaine de l’informatique, de l’accessibilité à l’information qui change la manière de travailler et de produire.

L’acceptation de cette résolution montrera ainsi la volonté du parlement de soutenir un Etat moderne, dynamique, respectueux du développement durable, encourageant l’économie de proximité et ouvert sur les citoyennes et citoyens, comme sur le monde.

Mesdames et Messieurs les député-e-s, les auteur-e-s de cette proposition vous remercient de la soutenir et de montrer ainsi l’ouverture du Grand Conseil sur un avenir respectueux et prometteur.